1001 Vies (768) : LA TENDRESSE DU SNIPER – 55
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… Je suis fatigué. Incroyablement fatigué. Fatigué de moi-même. Au réveil, levant une paupière d’ogre las, l’idée d’avoir à me supporter navre déjà. Je connais tout d’avance. Ce que j’aurai à dire, ce que seront pensées, émotions, sensations, les onze plaies du Christ et mes désirs de plus en plus avec l’âge modérés. Le tourniquet du même et cette libido, surtout, qui me devient un poids, qui n’est plus naturelle mais une sorte de vieille habitude dont on se dégage mal, un tic, une superstition, cette ferveur ancienne, cette croyance que quelqu’un d’autre existe et qu’il soit plus intéressant que nous-même et que cela rende joyeux qu’il soit, qu’il puisse même être un but, un souci et une attention ...
– Nous nous trouvions et nous perdions et nous n’aurions su faire autrement que de nous trouver et de nous perdre, puisque fragile en était la cause, imprévisible et scandaleuse.
Notre mauvaise ou notre bonne volonté n’y était pour rien, et peut-être vouloir être ensemble pour de vrai nous aurait perdus définitivement.
Il se peut aussi que me fuir à présent dans une résolution farouche ne fasse que nous rapprocher mieux ?
Nous nous étions entraînés à nous séparer, si peu de jours où nous ayons été ensemble, j'avais pris l'habitude d'en souffrir, on ne doit jamais prendre de mauvaises habitudes. Comment n'ai-je pas compris que la Créature dans sa grande Importance ne savait que faire de moi ? Ces contacts journaliers, ces emails, ces texto, cette attention à ne jamais laisser un mot de l'autre en plan, ce souci, ces délicatesses – de la politesse. Une impitoyable politesse –
[à suivre]