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Publié par Michel Castanier

La merveilleuse Autobiographie
Michael Sowa

 

Discussion de comptoir. Est-ce moi que je retrouve au réveil ? Difficile à dire si je ne sais rien du moi que je fus la veille, ou n’en ai de souvenirs que ceux conçus pour les besoins du jour. Pour l’imagination du jour. Tout ne s’est-il pas reconstitué différemment – peut-être créé le jour même de mon réveil. Le monde nait-il de ma cuisse ? La vie de mon sommeil ? L’aujourd’hui est-il la Création en continu ? Ma Création… Et dès lors, qu’en est-il de vous tous qui n’existez que par moi ? Vais-je vous subir jusqu’au soir ? Cette inconnue farouche qui me résiste comme une folle qu’elle est, cette folle va-t-elle enfin s’ouvrir dans mon sommeil du soir, lasse si lasse ?

Mais passons. L’homme bien né doit savoir quand sa fin est venue, n’est-ce pas ? Il est un moment où cet être avisé se dit : c’est l’heure. Il est temps. Il prépare ses bagages, rajuste sa cravate dans le miroir, met la clé sous le paillasson et disparaît avec le monde sous le bras. Je vous salue bien bas.

Shakespeare et Goethe m’avaient écouté avec attention, puis ils reprirent leur entretien là où ils l’avaient laissé.

 

Matin câlin. C’est lendemain de fête. L’air matinal est tendre, la place pacifiée, le citoyen rare, la moindre petite activité fait évènement. Le chien qui passe en serrant une balle en caoutchouc dans sa gueule. La fillette qui s’obstine à offrir son pain au chocolat à un inconnu embarrassé. Le serveur s’est assis et pianote son plateau. De temps à autre, des murmures. Les gens ne veulent rien de particulier, n’aspirent à rien. Ils sont tranquilles, selon le mot favori de la ville.

Bien sûr, l’intranquillité c’est le progrès, l’Humanité en marche, mais est-ce bien nécessaire, le progrès ? N’aurais-je pas été plus heureux, plus apaisé, à l’entrée de notre grotte avec ma compagne, à goûter la douceur de l’air, le passage lent d’un brontosaure dans les fougères ou l’envol charmant des ptérodactyles – et si ces animaux adorables n’étaient pas d’époque, ne nous serions-nous pas amusés à les imaginer ? Certes, l’ami des bêtes que je suis, très échauffé, aurait assez vite tiré Madame par les cheveux jusqu’au fin fond de notre caverne pour je ne sais quelle activité déplorable, mais ça, ça c’est l’intranquillité. Et le progrès, hélas, qui mène l’Humanité par le bout du nez.

 

 

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