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Publié par Michel Castanier

[Thami Benkirane]

 

 

(Une suite accidentée de hasards, de chances, de malheurs planétaires, de cataclysmes cosmiques, d’extinctions de masse, de survies improbables, de catastrophes évitées de justesse  : l’existence du petit homme effectuant une course à pied en jogging le long du Canal de la fontaine est un long et pénible miracle.

Notre chance est d’avoir été le rat musqué, la gazelle et la proie au bon moment, l’animal de circonstance le plus favorable à la survie astucieuse : nous extrayant du poisson des fonds océaniques à force de pompes au bord des plages, pour grandir en volonté de puissance jusqu’au grand lézard à voile de goélette en folie, et rapetissant opportunément jusqu’au rat des champs un jour de pluie de cendres, en sorte de nous faufiler dans le circuit des terriers sous la lave en fusion, pour remonter à l’air libre dans l’espèce du castor le long des cours d’eau, afin de bâtir notre actuelle civilisation à la force des battements de notre queue.

Si Dieu nous a voulus il aura beaucoup hésité.

Enfants du mariage de l’iguanodon et du blaireau, circulant avec une lenteur démesurée des terriers aux branches des grands arbres préhistoriques pour tomber de nos nids comme une feuille indécise et finir par effectuer quelques exercices d’assouplissement dans une salle de sport – est-ce tout ? À bien considérer cet interminable passé tumultueux rien n’est à attendre de bon pour notre avenir. Le futur désordre de la nature qui nous extrai­ra d’un Fitness Club pour une nouvelle galipette organique n’enthousiasme que modérément. Si nous devions persister sous forme de gélule médicamenteuse cryogénisée dans un obus d’acier et de feu, fuyant notre planète ratatinée à travers les abysses intergalactiques, serait-ce trop demander que ce soit plutôt sous l’espèce d’un grain de sel virevoltant dans les airs noirs pour une tournée d’adieu ?)

 

 

Je dois beaucoup à cette femme sans qu’elle en sache rien la malheureuse, elle serait effrayée, notre liaison si on peut ap­pe­ler ça une liaison a été une épreuve qui a servi de révéla­teur, qu’on me pardonne l’image facile, qui a donc servi de révéla­tion à bien des mécanismes en moi toute une machinerie autonome au­tomnale glaçante et qui sentait la mort.

Je me suis aperçu que je n’existais pas en personne c’est un phénomène assez connu mais peu admis peu reconnu surtout chez soi pas de ça chez soi.

La mémoire reconstitue sans cesse le corps des orteils au bulbe de nos cheveux. L’Inconscient ressaisit à son usage les symboles et l’histoire de l’humanité. Les autres m’y reconstituent sans cesse jusque dans ma solitude. Pas de voix profonde, mais des voix, des voix qui parlent

puisque ce n’est pas moi qui pense puisque ce qui se pense en moi est pensé par vous comme par un appel d’air ce que se dit ne se dit que pour vous par vous qui ne pensez que par moi pour  moi.

 

[à suivre]

 

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