Une Créature extraordinaire : la Femme

Dieu sait-il ce qu’il fait ? Pas sûr. D’ailleurs, il hésite, imagine Lilith, elle accourt à toute vapeur et manque culbuter. Déjà, elle fait la gueule. Un brouillon ? Une erreur ? Une mauvaise idée ? Une inconvenance.

Il se reprend. Il imagine Eve. Ce n’est pas mieux. Une faiblesse.

Arrivée sautillante de cette dame toute nue, révérence, parade nuptiale.

Imaginer la femme, notre sort, assureront les plus optimistes. Pas sûr non plus : Adam, dès son réveil, la considère et connaît sa première illumination.

– Je sais qui c’est ! Elle est la chair de ma chair, à peu de chose près !

Mais ensuite ? On se promène, on papote, on pique-nique. Le Serpent s’en mêle. Grand art de la conversation. Adam et Eve étaient assurément français.

Le serpent commence l’entretien d’embauche par une question, bien sûr sinueuse : alors, comme ça, Dieu a dit ? Mais non ! Mais non, les enfants ! Vous serez comme des dieux. Classique érotisation du champ social, chuchote Dieu, en aparté.

Justement. L’homme ne sait pas ce qu’il fait sur terre. Il ne le sait pas jusqu’à ce qu’il l’ait fait. Alors il lui donne un nom et s’en suffit. D’ailleurs c’est ainsi qu’il l’appelle : Sam Suffy. C’est une maison où loger lui-même, la femme de l’homme et leurs petits – Abel et Caïn qui jouent dans le jardin.

Il n’en a jamais assez de sa maison. Il lui faut l’agrandir. Toujours plus de pièces, de salons, de chambres et d’antichambres, de dépendances. Toujours plus de dépendance. Ça y est, il n’a plus de voisin. L’homme est heureux. C’est le bonheur.

Quand sa maison fait le tour de la terre, il invente l’avion pour aller avec Madame d’une pièce à l’autre toute la journée que Dieu fait. Le soleil ne se couche jamais sur sa maison. Sa vanité non plus. Il en meurt de plaisir. Il est mort. Sa vanité reste comme un coquillage vide.

Dieu ne sait pas ce qu’il fait. Il ne le sait pas jusqu’à ce qu’il l’ait fait.

Dieu est une blonde.

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