Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Publié par Michel Castanier

#fiction mystérieuse, Satire, Comédies, Personnage de fiction, #roman d'aventures, #nouvelles, Théâtre,  Littérature, Romans, #romans policiers, Prose, #récit, #fantastique, #comédie dramatique, #humour #contes
[Anonyme]

 

Antidotes – 38

 

Aristophane possédait le goût des détails et l’esprit scienti­fique, comme vous avez pu le constater si vous me suivez jusque-là, sautant avec circonspection d’une pierre à l’autre de mon gué mental sans perdre pied. Son sens de la précision ob­jective ne pouvait qu’enthousiasmer Alexander. Considérant l’exactitude comme la seule morale qui lui convenait (bien qu’au-dessus de ses forces), il saluait en lui le seul vertueux de ses amis.

Cette chère présence chaleureuse, savante et malicieuse était consciente du manque total de réalisme de son ami. Le boss, c'était plutôt Barnum et ses créatures : la femme araignée, l'homme fil de fer, les puces gymnastes au saut d’arçon... 

 

*

 

Parlons d’Alexander si personne ne s’y oppose, et de sa fête foraine : la façon dont il n’était jamais sorti du labyrinthe des miroirs anamorphiques, dont il avait roulé-boulé dans tous les escaliers à mouvements basculant et marches en va et vient au château fantôme et croqué toutes les pommes d’amour qui passaient à portée.

Et voici qu’à son âge il avait une barbe à papa et tournait toujours en rond dans son petit manège de chevaux de bois.

 

*

 

Il ne pensait que très vaguement. D'habitude ce qu’il disait n'assénait rien. Il se divertissait, c'était sa limite et il s'y tenait. Ne le prenez pas trop à la lettre.

Je le crains, il gardait d'une année sabbatique au parti communiste dans sa jeunesse décérébrée :

1 la persuasion que son pays était devenu après la guerre une colonie américaine et que Parisétait un champ de coton ;

2 la certitude que donner un pourboire à un serveur sera re­tarder la révolution prolétarienne.

Cela l’arrangeait. 1 il n'avait pas envie d'être relégué dans une langue littéraire au fin fond d'une province du monde 2 il n'avait pas les moyens.

Sa façon de voir peu sérieuse, amusée et dilettante, le sauvait. Pour rien au monde il ne l'aurait imposée à qui que ce fût. Je crois l’avoir dit, il n'avait pas l'esprit militant.

C’était se dérober à toute idée de confrontation. Il en avait fini avec l’adolescence idéaliste. Cela fatiguait nerveusement, n'était qu’affrontements de cerfs dans la sombre forêt et ne me­nait à rien. Un homme qui pensait au cours d’une conversation de bon ton était pour l’ennui d’Alexander un exhibitionniste, il était indé­cent, Alexander l’aurait volontiers lu, il ne l’écoutait pas. La lâcheté était plus confor­table. La contemplation plus amusante

D’ailleurs, il y avait peu d'antagonismes réels mais le plus souvent des glissements de sens – des variations sur la difficulté de vivre. Grosso modo, rejoignons-nous sur l'essentiel : ce à quoi dire non.

Le boss avait manifesté aujourd’hui. Il avait écrit manifestement.

 

*

 

On n'affine jamais assez son langage. Au hasard de ses ran­données sur Internet le boss est tombé dans un ravin : LFTI – un site de la licence de lettres de la Sorbonne : Le forum des win­ners !

Des winners ? 

Le deal à ne pas rater : PLANTRONICS BACKBEAT PRO 2 – Casque bluetooth !

Le site de la Sorbonne ?

Putain d’Adèle !

Désolé. Calmons-nous.

 

*

 

Ce n'est pas tant la modernité qui l'exaspérait que sa forme actuelle d'imbécillité – mais c'était se prêter d'être intelligent à bon compte.

Et de toute façon, comme tous les « gens bien », il était en exil dans ce siècle. Complainte très courue siècle après siècle – à ce que prétendait notre cordonnier.

 

 

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article