1001 Vies (629) : Hildegarde, la fraise et moi – 2

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Elle lisait la Physiologie du goût à cette époque et lui pro­mettait quelques gourmandises. Ils n’en étaient pas là. La France per­dait  2 à 0 contre l’Autriche, Johnny Halliday s’éton­nait auprès de Christine Angot : il n’y a donc jamais de repos pour l’homme ? Rachida Dati avait une vie privée com­pli­quée, le Pré­sident était petit mais son épouse était grande, Christine Angot n’aimait pas la sodomie, comme d’habitude, et les lasagnes d’Hildegarde n’étaient toujours pas prêtes.

Au téléphone elle parlait beaucoup, peut-être trop – ou nerveusement. Elle était parfois très dix-huitième siècle dans son expression. Ainsi démarrait-elle chacune de ses matinées assez tôt et « en­thou­siaste au jour qui vient, par une sorte de bonne disposition de caractère ». C’était au fur et à mesure de la journée que le transport se modérait. Et, toujours, elle essayait de faire et de faire de son mieux. Elle se sentait seule, sans l’être, mais ne l’étions-nous pas définitivement, intrinsèquement ? Plus en­core lorsque le repli sur soi par la douleur s’impose.

Qu’avec grâce ces choses étaient dites. Il prit au sérieux ces mots, mais pas suffisamment, cependant il se poudra, tal­qua, parfuma, mit la perruque bouclée, enfila les bas de soie blanche, boucla le ceinturon de l’épée à sa taille et, rendu à la librairie, l’encouragea à sa manière mo­queuse.

Allons courage ! lui dit-il. Aujourd’hui, comme hier, le cœur saigne. Le combat est solitaire, d’un devoir sans gloire, mais souvenez-vous-en aux moments douloureux : chaque pas sou­lève la poussière et laisse son empreinte d’argile, creusée de mille fatigues. Guettons ensemble ce point à l’horizon où les ombres empoignent le pèlerin devenu si léger, si fragile qu’il ne semble plus laisser aucune trace. Et ne doutez pas de votre devoir qui est d’aimer la vie des lisières où les mangeurs de lune conjuguent leurs peurs aux croyances premières. Vous le savez bien au fond de votre cœur, brave Hildegarde : vous n’êtes pas seule, chacun est un monde et le monde est fait de chacun. Ragaillardie en ce matin douloureux (la migraine ?), vous clamerez alors à la face rébarbative des dieux : Je ferai de mon mieux ! 

Du courage il en faudrait aussi pour démêler ce qui était à Dominique de Villepin, à Ségolène Royal et à Clara Bruni dans ce mix qu’il avait concocté pour elle

Ils auraient dû dîner ensemble. À son tour, il n’avait pas osé. À quel entresol serait-elle tombée, cette fois ? À quoi elle rétorqua : avec bon vin point de misère – ce qui n’avait pas grand sens, ou peut-être que si.

Elle se permit de l’embrasser, s’assura de son épée et le laissa sur le côté.

[à suivre]