Les nerfs à vif

Les nerfs à vif

Mon épouse me trouve « énervé » ces temps-ci. À cela deux raisons.  Ma condition ne se prête pas à la bonne humeur. Les gens qui souffrent des nerfs ont en commun avec les handicapés (ce qu’ils sont, d’une certaine façon) d’être assez peu patients, et d’abord de considérer avec suspicion la bonne santé de leurs proches. Où est passé leur propre excellente condition physique, la leur aurait-on volée ? Quel meilleur cambrioleur que votre insoupçonnable épouse qui vous a sous la main tout au long du jour et de la nuit, profitant de votre sommeil ou d’une distraction rêveuse (vous êtes si souvent pensif) pour vous faire les poches – faire les poches de votre fluide vital, en somme de votre âme, hold up qui témoignera du moins que vous avez une âme (et des poches pleines à cette âme, des poches sous les yeux, signes de votre totale exténuation du fait de vos soucis physiologiques et de l’indifférence crapuleuse de votre épouse – un épuisement qui, harassant votre pauvre esprit, ne permet plus de retrouver la seconde raison de cet énervement dont elle vous accuse, bien qu’à considérer l’étymologie du mot – à en extraire la racine – cet énervement ne puisse avoir pour cause que cette même épouse – la dent malade – dont il serait peut-être temps de vous débarrasser par les moyens d’usage et donc de recouvrer enfin une partie de votre calme, seulement une partie de votre calme puisque rien ne vous débarrassera du plus problématique, du plus acharné à vous en vouloir, du plus enraciné en vous – jusqu’à présent, mais qu’est-ce donc ?).

Heureusement que je n’ai jamais épousé qui que ce soit.