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Publié par Michel Castanier

 

Sur ce, le grand Auteur referme le capot de l’ordinateur qui claque comme la portière d’une Rolls Royce en inextinguible douceur distinguée.

Une sonnerie infime (un frottement ?) agace l’oreille du Titan des Lettres locales. Il finit par en situer l’origine dans le magnétophone qui enregistrait son monologue pour la postérité, quand le bourdonnement de la glaciation du vieux Frigidaire prend le relais. Hypersensibilité de l’ouïe ? Signe de dépression ? Acouphènes ? il estime plutôt que ces exacerbations acoustiques sont ce phénomène printanier : l’appel de l’Inspiration.

Bientôt, les fenêtres étant grandes ouvertes par cette nuit d’été caniculaire où se donne un concert zozotant de cigales méditerranéennes, il entend au loin – très loin – les motos d’un troupeau de Hells Angels sur la place de la Nation, douzième arrondissement parisien, tourner pour attraper le pompon dans un des manèges de la Foire du trône.

Décidément l’irrationnalité lui va à l’esprit comme un gant de soie aux doigts du talent. Il sort sous les bourrasques du Mistral fouetter les chevaux mécaniques de son Char de triomphe autour des Arènes romaines de sa ville natale, une couronne de laurier ceinte à son front. 

Un singe – posé sur son épaule – lui chuchote à l’oreille un conseil avisé.

 

Bien sûr, quoique les comités de lecture m’aient accordé bien des souhaits de bonne continuation, je n’obtenais que des pages trop sophistiquées et même douteuses ou déplorablement lyriques : sans doute les épluchures de patates douces de mes pensées les plus précieuses et parfois l’amertume dorée d’un petit verre d’Amaretto, ce doux péché : le bon mot à la bonne place.

« Et si j’écrivais comme tout le monde ? », disais-je soudain, ému, à mon fidèle lectorat.

De fait, la tentation romanesque, la tutelle du roman, si confortable, me hantait – pas de quoi trousser les jupes de la vieille dame Littérature, précisais-je, car, depuis peu plus prudent, quasi humble, presque patient, au bord du silice, admettant n’espérer que quelques ricochets heureux sur l'eau plate de ce qui se publie, j’imaginais de m’appuyer sur une temporalité rassurante, ordonner une harmonieuse architecture, développer des personnages qui nous ressemblent et relaient l’attention, poursuivre l’action frénétique qui mène par le bout du nez sans le forcer : il éternue ou se dérobe.

 

[à suivre]

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