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Publié par Michel Castanier

Masao Yamamoto

 

 

Pourquoi, hein, pourquoi ?

 

Sans doute le vent de la course le rendait-il plus eu­pho­rique qu’il n’aurait dû.

Siphonette avait la tête inclinée de côté, comme pour mieux prêter l’oreille, et c’était très douloureux de la voir aussi calme, seu­lement cu­rieuse de ce qui allait passer, pas très in­quiète, l’observant avec confiance.

Il lui fit un grand sourire.

– Ne t’en fais pas.

C’était étrange mais vrai, même en plein jour, du fond d’un puits, on aper­çoit les étoiles briller dans un ciel nocturne – cette lumière du cosmos les gui­dera comme un fanal.

Elle ne s’en faisait pas plus que ça, en effet.

– Bon alors, elles sont où les merveilles que tu m’as pro­mises ?

Il y avait par intermittence dans le gouffre des bruits de pluie in­quiétants. L’eau risquait d’alourdir les ailes. Achille s’en écarta d’une légère inclinaison des épaules.

Il avait le corps poissé par la cire qui se liqué­fiait dans la sueur de la cons­tante acti­vité de ses muscles. Il perdit bientôt autant de plumes que s’il avait parti­cipé à un combat de coqs, et l’armature des ailes ne suf­fi­sant plus à le soute­nir, il s’en dé­ga­gea, la ma­chinerie retom­bant au sol, tandis qu’il se propul­sait avec confiance, sa jolie com­pagne à sa taille, par la seule aspi­ra­tion d’une joie hors du commun, l’air vibrant sous les magni­fiques triples sauts pé­rilleux parmi les nuages… 

 

[Portes du labyrinthe]  

 

                                                                  … Il doit être aux en­vi­rons de midi. Des ro­saces de petits nuages noirs se dis­persent comme la fu­mée des canons. La brume mati­nale joue encore avec les vagues de la Méditerranée. Le soleil tour­ne le dos dans les nuages.

Un corps lancé des hauteurs du ciel éclate comme une pas­tèque sur le galet gris de la mer… 

 

[Portes du labyrinthe]  

 

                                       … Une trace d’écume fugitive marque la présence d’une chute dans le Léthé, le fleuve d’oubli au fond des eaux : une vie est pas­sée là …

Un cœur explosé en pièces détachées se reconstitue dans les profondeurs obs­cures des eaux où le funambule descend, l’esprit sonné, le corps tout rougi de la claque de l’eau, quand…  

 

[Portes du labyrinthe]  

 

                                       … Un magnifique ciel bleu accueillit la chute d’Achille. Un colibri à queue jaune – ce qui devait être un coli­bri à queue jaune, mais son regard était éton­namment pen­sif – sif­flotait avec bonne hu­meur au bord d’une branche.

– Il vaut mieux en rire, dit l’oiseau.

Il était une mai­son à l’orée de la clairière, assez inquiétante, à ce point en­cas­trée dans la forêt que des ra­cines devaient en­trer dans la cave. Un mur bom­bé cré­pi de lait de chaux et la toi­ture invisible dans le feuil­lage qui bruis­sait. Une fe­nê­tre (le cu­rieux châssis de plaques de mica translu­cides ne re­flétait du sous-bois que des ombres mou­vantes).

– Oh ! Un gnome !

Une jeune fille étrange – à peu près de l’âge d’Achille et de sa taille – ap­pa­rut à la fenêtre.

Et disparut.

 

 

                                                                        FIN

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