Aimable légère I Au bord du monde – 4
4
Au détour d’une ligne d’azalées, le vieux cimetière de la Cité des mille fleurs où repose le père pendu fait face au lac bleu entre les pins.
Le cimetière est un jardin secret parmi les dunes de la Cité, où l'enfant aime à jouer, les bras en croix, après une chute lente, artistiquement décomposée, gisant sur la dalle tiède d'une tombe dans une pose plutôt harmonieuse, les traits en paix, enfin calme et détendue – mais, l’œil fixe, elle guette. Les libellules et les grillons ont des bonds gigantesques par-dessus son petit visage immobile ; une animation permanente la veille; un bourdonnement d’abeille; le frémissement éphémère d’un sphinx ; les frissons des cyprès; le cri de deuil des cigales ; la voix de son père qui chuchote par l’intercession du vent passant sur les herbes du cimetière.
C’est donc la mort, ce passage tranquille du temps autour d’un corps inerte, inaccessible? L’esprit, arrêté comme une branche flottante sur un écueil, regarde la vie d’Aline bouillonnante et légère fuir sans l’entraîner. L’âme de Violette flotte longtemps avec les ruisseaux de lait des nuages au-dessus de l'étang et dérive vers le large bleuté, clair et parfumé.
[À suivre]